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Au Musée du Luxembourg :
Pissarro ou la nature retrouvée

Frédérique Maupu-Flament
Kiné actualité n° 1495 - 29/06/2017

Envie de calme bucolique, de nature sans artifice ? Emboîtons le pas du peintre Camille Pissarro pour une magnifique promenade à la découverte d'Éragny, la propriété adorée du père de l'Impressionnisme.

S’il y eût un peintre capable de réussir dans ce qu’Octave Mirbeau appela “la grande affaire d’émouvoir”, c’est bien Camille Pissarro. “Peu de paysagistes ont, comme lui, le sentiment juste, sain et superbe des choses agrestes. Il rend l’odeur à la fois reposante et puissante de la terre…”, notait le critique d’art dans la revue Gil Blas du 14 mai 1887. Cet hommage au talent du peintre pour rendre l’esprit de la nature est au cœur de l’exposition du Musée du Luxembourg qui dévoile des toiles inédites en France et des gravures superbes.

Placée sous l’égide de deux spécialistes de l’artiste, Richard Brettell et Joachim Pissarro (son arrière-petit-fils), elle aborde la période la moins étudiée et la plus complexe de sa carrière. L’exposition présente d’abord de nombreux tableaux de la ferme familiale que le peintre a immortalisée dans toutes les saisons. L’humain y est également présent avec des toiles représentant des personnages, conçus dans l’atelier et “replacés” dans les terrains champêtres d’Éragny.

Un hommage sensuel à la terre
C’est dans sa maison d’Éragny (Val-d’Oise), sur les bords de l’Epte, qu’il trouva à la fois son havre de paix et sa principale source d’inspiration. Pissarro en était amoureux au point de s’y fixer complètement et d’y construire le rêve de toute une vie. Jamais il ne se lassa de représenter les paysages alentours et les paysans aux travaux des champs. Impressionniste de la première heure, Pissarro savait rendre hommage à la beauté de la nature mais il excellait surtout dans l’art d’en restituer la sensualité et la réalité. Sa peinture offre donc une dimension à la fois sensorielle puissante et presque philosophique car pour lui, la campagne est bien plus qu’un paysage : c’est un lieu d’utopie et de réalisation collective et familiale. Alors qu’à quelques kilomètres de là, à Giverny, Monet échafaude un Jardin d’Eden au charme romantique, Pissarro construit une vraie ferme, avec des plantations, des animaux et même des champs de céréales. Aidé dans son projet par son industrieuse épouse Julie, mère de ses huit enfants, il fait d’Éragny une véritable exploitation agricole qui fonctionne sur un modèle collectif, dont toute sa famille profite.

Camille Pissarro, "Le Bain de pieds", 1895.
Huile sur toile, 73 x 92 cm, États-Unis,
The Art Institute of Chicago A Millenium Gift of Sara Lee Corporation.

Éragny, une étape nouvelle
Les premières années à Éragny marquent une étape nouvelle dans la vie artistique de Pissarro. Peu après son arrivée, sa technique impressionniste évolue radicalement. À cette recherche de lumière en lien avec les changements du temps si chers à son cœur, se mêlent de nouvelles interrogations sur le contraste des couleurs complémentaires, annonçant le style néo-impressionniste qui marquera la suite de son œuvre et son rapprochement avec le peintre Seurat.

Chez Pissarro, la vision du monde paysan n’a pas l’âpreté et la tristesse d’un Millet ou d’un Van Gogh. L’homme a des travaux de la terre une idée assez enthousiaste, aussi montre-t-il un monde rural plutôt naïf mais très attachant. Cette évocation est toujours juste, placée sous l’angle des émotions et des sentiments. Pissarro n’était pas seulement fasciné par le travail de la terre et le monde rural, il se sentait proche des joies simples offertes par la nature à ceux qui vivent près d’elle.

À Éragny, il jouissait pleinement des générosités de la nature, à l’image de cette paysanne trempant ses pieds dans la rivière. Aujourd’hui, son œuvre sonne comme un hommage vibrant à la terre, mais aussi comme un message d’espoir adressé à l’homme pour qu’il en prenne soin.

Jusqu’au 9 juillet 2017
Musée du Luxembourg
19 rue Vaugirard, 75006 Paris
www.museeduluxembourg.fr

© Joslyn Art Museum, Omaha, Nebraska
© The Art Institute of Chicago


Au Musée d’Orsay

Cézanne portraitiste de l’âme
Cézanne a peint près de deux cents portraits au cours de sa carrière, dont 26 autoportraits et 29 ayant pour modèle Hortense Fiquet, son épouse. L’exposition du Musée d’Orsay explore tout l’univers de Cézanne portraitiste, notamment ce parti pris artistique d’offrir plusieurs versions d’un même sujet, variations subtiles ou plus tranchées d’un même modèle. Les œuvres présentées, issues de collections privées et de prestigieux musées du monde entier, vont du remarquable portrait de l’oncle Dominique datant des années 1860, jusqu’aux ultimes représentations de Vallier, son jardinier à Aix-en-Provence, réalisées peu de temps avant la mort du peintre en 1906.

Paul Cézanne (1839-1906), "La Femme à la cafetière",
vers 1895. Huile sur toile, 130 x 97 cm, Paris, musée d'Orsay,
don de M. et Mme Jean-Victor Pellerin, 1956, RF 1956-13.

L’approche chronologique de cette exposition permet d’étudier l’évolution de ses procédés et de son style, tout en percevant la continuité de son propos. Elle offre aussi l’occasion de questionner la “ressemblance” du modèle avec la peinture représentée et de redécouvrir sous un jour nouveau, avec encore plus de profondeur, celui que Matisse et Picasso appelaient avec une reconnaissance affectueuse “notre père à tous”.

Jusqu’au 24 septembre 2017 - Musée d’Orsay - www.musee-orsay.fr

© RMN-Grand Palais (musée d'Orsay)/Hervé Lewandowski

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