Le Bélisaire :
Du bonheur à partager
Frédérique Maupu-Flament
Kiné actualité n° 1492 - 08/06/2017
C'est une adresse qu'on aimerait garder pour soi mais qu'on partage avec ceux qu'on aime. Un lieu gourmand et accueillant, à l'image de son chef et propriétaire, Matthieu Garrel, à la forte personnalité.
Le Bélisaire est caché dans une petite rue du 15e arrondissement, à deux pas de la rue de la Convention. Devant la porte ouverte, on s’attroupe pour discuter, habitués du quartier, fournisseurs venus apporter quelque merveille de leur province lointaine et qu’on goûte debout sur le trottoir, un verre de vin à la main. Matthieu Garrel est là, tout sourire. Au-dessus de la barbe, le regard est malicieux. Juste en dessous, la parole fuse avec entrain. Vous êtes ici chez lui, mais bien vite vous vous sentirez comme chez vous.
Le chef Matthieu Garrel. |
L’apéro au comptoir, un grand moment de bonheur
Matthieu Garrel n’est pas du genre à exhiber ses lettres de noblesse culinaire. Ses trophées de maître restaurateur, il les laisse à l’intérieur et confie la devanture à la sobriété d’un restaurant dans son jus 1920. Dès l’entrée, on est transporté dans le temps. Le comptoir, inchangé depuis les premiers bons mots d’Audiard, accueille si généreusement qu’on a tout de suite envie d’y prendre l’apéro avec les Tontons Flingueurs. Un moment d’autant plus précieux que Matthieu Garrel est là pour faire l’animation avec Patrice, flegmatique officier de salle à la moustache malicieuse et à l’œil qui frise.
Ancien second de Gérard Besson, le chef Garrel a appris de son mentor le goût du produit d’exception et la mise en valeur sans effet de manche. Sur l’ardoise défilent chaque jour six entrées et six plats aux intitulés qui titillent les papilles. Tous sont élaborés avec des produits de saison qui offrent le meilleur de nos terroirs, à l’image de ces poissons et crustacés qui viennent directement de Bretagne, comme le maître des lieux.
Dans l’assiette, tout est net et soigné, plein de l’esprit d’une belle cuisine bourgeoise dans la plus noble acceptation du terme. Les poissons révèlent leur saveur avec des cuissons millimétrées, les langoustines sont nacrées, les coques fermes et fondantes à la fois, les légumes confits ou craquants, mis en valeur dans leur rusticité.
Escalope de foie gras poêlée aux coques, petits légumes confits au bouillon d'épices tajine. |
Une folle envie de revenir
Les mariages de saveurs sont originaux, témoins ces huîtres de Saint- Philibert “en fraîcheur du Japon” (le chef est fan de ce pays) réveillées par une sauce à base de caviar végétal et de soja. On aime aussi les coques, servies dans un bouillon avec du jambon ibérique fondant à souhait. Régal également que ce foie gras poêlé présenté façon tajine avec des légumes et du bouillon dans lequel s’ébrouent quelques coques. Côté dessert, le fondant en chocolat est moelleux et pas trop sucré, ce qui permet de finir le repas sur une note suave mais pas envahissante. D’ailleurs, la seule chose qui soit envahissante au Bélisaire, c’est cette envie d’y revenir pour prendre, à la lueur des suspensions en pâte de verre, la mesure d’un temps qui passe avec bonheur.
Le Bélisaire |
© D.R.