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À Lewarde, dans le Nord :
Un musée inspiré

Frédérique Maupu-Flament
Kiné actualité n° 1478 - 23/02/2017

C'est l'un des plus originaux musées de France et sans nul doute celui qui a su le mieux placer l'humain au centre de son projet culturel. Situé sur le site de l'ancienne fosse Delloye, à Lewarde, le Centre historique minier consacre une exposition à "Germinal", le chef-d'oeuvre d'Émile Zola.

Vraisemblable ou pas, le chef-d’œuvre de Zola ? Réalistes ou imaginaires, les descriptions de la vie dans la mine en 1866 ? Ces questions sont au cœur de l’exposition “Germinal, fiction ou réalité ?” au Musée de la mine de Lewarde dans le Nord. Treizième opus de la série des Rougon-Macquart, Germinal est l’un des plus célèbres romans du père du Naturalisme, courant qui s’attache à décrire sans fard la réalité de son temps. En interrogeant la vraisemblance du roman et la part de l’imagination de l’écrivain, entre notes de ce dernier, extraits du roman et documents d’époque, l’exposition propose des allers et retours entre réalité et fiction, imagination et “vraie vie”.

Elle permet également de découvrir les méthodes de travail de Zola qui, sous couvert de raconter la vie du mineur Germinal, se livre à une analyse sociale engagée de son époque.

Affiche de l'exposition "Germinal : fiction ou réalité ?"

Une véritable enquête de terrain
Par souci de réalisme, Zola se rend à Anzin, visite la mine et rencontre à plusieurs reprises son directeur, Henri Guary. De ces entretiens, il tire des Notes sur Anzin, précieuses indications sur sa façon de travailler. On y découvre que l’écrivain se livre à une véritable enquête et ne néglige aucun détail. Il veut comprendre comment fonctionne une mine, mais aussi comment la compagnie minière est gérée et administrée. Vêtu de la blouse blanche du mineur, le “bourgeron”, et coiffé d’une barrette en cuir comme les travailleurs du fond, il emprunte la cage et parcourt le dédale des galeries, observe le puits, les machines d’extraction. Il regarde travailler les hommes, mais aussi les femmes et les enfants (les “galibots”) au tri du charbon.

Cette expérience à 675 m de profondeur, sous la conduite de l’ingénieur Mercier, le marque profondément. Chaleur, obscurité, étroitesse des boyaux, saleté, l’écrivain s’imprègne de tout. Avec passion, il note les gestes et les postures, appréhende l’extrême dangerosité de ce travail. En écrivant ensuite son roman, il retranscrit ses propres impressions, donnant à son récit la puissance du vécu, même s’il s’arrange à l’occasion avec la réalité, par exemple quand il noircit certaines situations dans le but de défendre ses idées sociales.

Finalement, la question “Germinal, fiction ou réalité ?” n’est jamais tranchée et ce n’est pas le plus important. L’essentiel est de comprendre ici les liens entre réalisme et souci littéraire, d’explorer tout autant le monde minier que les ressorts de l’inspiration littéraire. Pari réussi ! D’ailleurs, si le voyage a titillé votre imagination, le musée propose d’emboîter le pas de Zola avec l’atelier “À votre tour, écrivez la mine”.

 “Viens min Ch’ti quiquin !”

■ En mars, le Centre minier consacre plusieurs rendez-vous au parler patoisant. Le 18 mars, c’est un dîner-spectacle au restaurant Le Briquet pour la représentation de Saisissemints, spectacle en patois créé par la “Compagnie du reste ici” (à partir de 20h. Tarif : 33,90 €/pers. tout compris. Tous publics. Sur réservation au 03 27 95 82 96).
■ Le 26 mars, le Centre accueille la “Compagnie On Off” pour un récital lyrique déjanté inspiré du répertoire régional. On pourra y entendre notamment la reprise folle de “Comme d’habitude” version Ch’ti, “Tout di parèle”, et les immortels “P’tit quinquin”, “Quand la mer monte” et “Tout in haut de ch’terril” (réservation au 03 27 95 82 96).
■ Enfin, durant tout le week-end des 18-19 et 25-26 mars, l’ancien mineur Michel Petit partagera ses souvenirs en rouchi, le patois de la région (14h30 “Mon premier jour à la mine” et 16h “Le retour à la maison”). Durée 30 mn. Tarif : 1,80 €.

Vue générale du site. Exposition "La vie dans la cité minière".

Un centre culturel minier unique en France
Le 21 décembre 1990 n’est pas une date comme les autres. Ce jour-là, les Houillères du bassin du Nord-Pas-de-Calais ferment leur dernier puits d’extraction de charbon. La fin de trois siècles d’histoire industrielle et humaine débutée à Anzin en 1720. Reste un patrimoine à ciel ouvert d’une richesse incroyable, devenu en 1984 un lieu de mémoire. Installé sur le site de l’ancienne fosse Delloye à Lewarde, le Centre historique minier réunit un centre de ressources documentaires avec toutes les archives des compagnies minières, un centre de culture scientifique de l’énergie et le musée de la mine.

Ce dernier est le premier musée du genre en France et l’un des premiers d’Europe. Il attire chaque année 150 000 visiteurs.

En pratique :
Musée minier de Lewarde
Fosse Delloye BP 300
39 rue d’Erchin 59287 Lewarde
Tél. : 03 27 95 82 82 – www.chm-lewarde.com

© E. Watteau/Centre historique minier

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