17es Assises de la kinésithérapie :
La démarche qualité, un outil pour faire grandir la profession
Alexandra PICARD, Sophie Conrard
Kiné actualité n° 1453 - 30/06/2016
L’objectif était de poser les bases d’une réflexion autour de la démarche qualité en kinésithérapie, et de montrer qu’elle n’est pas réservée aux établissements de santé. Défendue avec enthousiasme par Sébastien Guérard, premier secrétaire général de la FFMKR, qui participait à cette table ronde, la démarche qualité doit bien entendu rester “volontaire et auto-évaluative”. Pas question de l’imposer à qui ne souhaite pas s’y engager. Mais elle pourrait permettre à la profession de “grandir” et de “valoriser son image” en “formalisant par écrit certains éléments qui pourraient ensuite être valorisés dans le cadre de négociations”, aussi la Fédération s’y intéresse-t-elle de près. Peut-être même serait-elle un élément clé de l’évolution vers une “profession médicale à compétences définies”.
La salle a écouté avec grande attention Jocelyne Wittevrongel, présidente de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), qui s’est elle-même engagée dans cette démarche il y a quelques années, jusqu’à obtenir la certification. “Souvent mobilisée à l’extérieur de mon officine en raison de mes engagements syndicaux, je souhaitais mettre en place des procédures harmonisées pour que tout tourne bien lors de mes absences. Une fois la certification obtenue, c’était aussi un moyen de montrer aux patients et à l’assurance maladie que nous travaillions bien”, a-t-elle raconté, précisant que “la démarche qualité n’a aucun intérêt s’il s’agit d’accroître le temps administratif au détriment du temps réservé aux patients”. Par ailleurs, elle a insisté sur l’importance du volontariat. “Si l’ensemble d’une profession choisit de s’engager dans une démarche qualité, la certification doit rester optionnelle, de manière à ce que tous les praticiens ne soient pas obligés d’aller jusqu’au bout de la démarche.”
Sébastien Guérard, premier secrétaire général de la FFMKR, a manifesté son enthousiasme pour la démarche qualité. |
L’oreille attentive de Nicolas Revel
Le directeur de la Cnamts, Nicolas Revel, a d’emblée affirmé qu’il était “très favorable” à la démarche qualité et que c’était “le plus puissant vecteur d’économies” qu’il connaisse : “Cela coûte cher de ne pas soigner les gens à temps ! Il faut au contraire prodiguer le juste soin au bon moment”, a-t-il insisté.
Désireux de rassurer l’auditoire, il a précisé qu’il ne fallait y voir “aucune volonté de contrôle” mais au contraire “un élément structurant pour la profession”. Si l’assurance maladie n’a pas de rôle à jouer dans le fait qu’une profession se lance (ou non) dans une démarche qualité, elle peut intervenir “en l’intégrant dans le cadre de nouveaux modes de rémunération con-ventionnels”. Mais pas n’importe comment ni à n’importe quel prix, l’aide de l’assurance maladie ne devant pas se réduire à une “indemnisation du temps perdu”. Selon lui, plusieurs pistes de réflexion peuvent être envisagées, comme “l’intégration de la ROSP par les masseurs-kinésithérapeutes”. Voilà qui n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd, alors qu’un nouveau cycle de négociations doit s’ouvrir en fin d’année pour la profession.
Jean-François Thévaut, membre su Conseil de la HAS, et Jocelyne Wittevrongel, présidente de la FSPF. |
Un référentiel mais pas d’uniformisation des pratiques
Le Dr Jean-François Thébaut, président du Conseil national professionnel de cardiologie et surtout membre du Conseil de la Haute autorité de santé (HAS), au nom de laquelle il s’exprimait, a insisté sur le fait que cela faisait “partie de la responsabilité éthique d’une profession de garantir un certain niveau de qualité des soins”, d’où le rôle crucial des conseils nationaux professionnels et collèges de bonnes pratiques. Il a également souligné qu’une démarche qualité “permettrait à la profession de disposer d’indicateurs précis pour améliorer
la pertinence des soins, que seuls les professionnels peuvent réunir et développer”. Ces indicateurs n’existent pas aujourd’hui et c’est à son sens “vers cela qu’il faut tendre”. Des données sur lesquelles la FFMKR travaille déjà : traçabilité des actes, hygiène, qualité de l’accueil, confidentialité et bien d’autres critères ont été évoqués.
Pourrait être mis à disposition des professionnels “un manuel établi sur une certification collective s’apparentant à un référentiel de qualité, sans pour autant tout protocoliser ni imposer une uniformisation des pratiques”, a précisé Sébastien Guérard.
Il faut que chaque cabinet de kinésithérapie puisse y trouver son compte et progresser, quels que soient son profil, sa taille, ses moyens ou ses ambitions.
Rien n’est décidé, mais la FFMKR a profité de ces Assises pour manifester son grand intérêt pour la démarche qualité. Au-delà des perspectives financières, elle désire s’emparer de ce projet “avec l’aide de tous les interlocuteurs concernés : assurance maladie, HAS, Ordre, Collège de la masso-kinésithérapie, etc., avant qu’une tutelle ne nous l’impose. Il est important que nous en conservions la maîtrise”, a noté le premier secrétaire général de la FFMKR. Nul doute que le sujet reviendra sur la table au moment des négociations conventionnelles !
[1] Compte-rendu à lire aussi dans les Ka n°1454 et 1455.
© S. Conrard/Kiné actualité