Depuis 70 ans
Christophe Dauzac
Kinésithér Scient 2015,0570:01 - 10/11/2015
Elle vient de fêter ses 70 ans. Elle a peu d’équivalent dans le monde. Elle est ouverte à l’ensemble de la population. Tous les usagers l’aiment. Ce n’est pas la kinésithérapie. C’est l’institution qui, en 1962, a vu s’établir la première convention signée entre la Caisse nationale d'assurance maladie et les masseurs-kinésithérapeutes : c’est la Sécurité sociale ! Et pourtant ce symbole égalitaire, qui assure une grande part de la protection sociale en France, voit chaque année ses détracteurs se manifester : elle « coûte trop cher », elle est « toujours en déficit ». Et les kinésithérapeutes participeraient à l’explosion des dépenses de soins dans certaines régions, quand ils ne sont pas accusés de frauder. Les effets de la crise économique rendent nerveux les gestionnaires qui ont de plus en plus de difficultés à maîtriser les ressources disponibles.
Le plan mis en œuvre par Pierre Laroque, qui créa la Sécurité sociale en 1945, visait à « protéger chaque famille contre tous les facteurs d’insécurité, aussi bien ceux qui sont actuellement connus que ceux qui peuvent apparaître dans l’avenir. ». Depuis, respectant cet objectif, de nombreuses lois et ordonnances ont organisé et fait évoluer le système, en fonction des besoins sociaux. 1947 et 1961, création des régimes de retraite complémentaire ; 1945, instauration des trois régimes d’assurance vieillesse ; 1967, réorganisation du régime général ; 1982, abaissement de l’âge de la retraite à 60 ans ; 1988, revenu minimum d’insertion ; 1990, contribution sociale généralisée ; 1993, réforme des retraites ; 1996, contribution au remboursement de la dette sociale ; 1997, carte Vitale ; 1999, couverture maladie universelle ; 2003, réforme des retraites n° 2 ; 2012, régime social des indépendants ; 2010, réforme des retraites n° 3.
Au fil du temps, l’assurance maladie obligatoire permet encore d’être correctement soigné et remboursé des soins de santé. Le système a
montré qu’il savait se renouveller et se moderniser. Des mesures concerneront les usagers et les professionnels en 2017, comme le carnet de santé numérique. Il devrait contenir les compte-rendus d’hospitalisation des patients, les résultats de biologie, les radiographies, les courriers de liaison entre médecins spécialistes et médecin traitant.
Le coût des soins augmente, mais leur efficacité aussi. L’accroissement des dépenses n’est-il pas à mettre en relation avec l’augmentation de la longévité ? Ne nous en plaignons pas. La kinésithérapie prend sa part ; elle participe à la baisse des handicaps et à l’amélioration de la qualité de la vie. La qualité des soins efficients repose certes sur la technicité mais aussi sur le professionnel, qu’il soit personnel hospitalier ou praticien libéral. Les rétributions ne correspondent pas aux efforts qui lui sont demandés.
Les gains en bien-être obtenus grâce à la kinésithérapie dépassent largement le coût de ce qu’elle engendre. La preuve est difficile à produire et ne pèse peut-être pas assez lourd face aux défits financiers. Si la pérennité de la Sécurité sociale française est l’affaire de tous, considérons que la défense des intérêts des kinésithérapeutes doit être partie prenante. C’est bien sûr le rôle des syndicats qui participent à la transformation du système de santé. Sur ce plan, l'année 2016 promet d'être cruciale, avec l'ouverture au deuxième semestre d'un nouveau cycle de négociations entre la profession et l'assurance maladie.